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TAFTA : le Parlement européen renonce à se faire l’écho des citoyens

mercredi 8 juillet 2015

La plénière du Parlement européen a établi aujourd’hui son positionnement sur l’accord transatlantique, dans une résolution très décevante pour tous les citoyens préoccupés par implications probables du futur traité.

Ignorant les 97 % d’avis opposés lors de la consultation de la DG Commerce en 2014, les eurodéputés n’ont pas souhaité rejeter l’inclusion d’un mécanisme de règlement des différends Investisseurs-États dans l’accord futur, alors que celui-ci donnera aux entreprises étrangères le droit exclusif d’attaquer des États. Le Président Schulz s’est assuré le soutien des élus libéraux et conservateurs en proposant un compromis fait de formulations sibyllines, qui reviennent à accepter l’ISDS dès lors qu’il portera un autre nom.

Le texte comporte d’autres éléments problématiques : il cautionne le principe de la coopération réglementaire, entérine la disparition de l’agriculture paysanne et la fin d’une alimentation de qualité. Il fait fi de l’impératif de lutte contre les dérèglements climatiques en appelant à la libéralisation des échanges d’énergies fossiles. Il n’applique aucune précaution à la libéralisation des services financiers et soutient une approche de négociation hybride concernant les services, la plus dangereuse. Le Parlement européen choisit donc aujourd’hui de s’inscrire à contre-courant d’une grande part de l’opinion publique européenne, et même d’instances communautaires telles que le Conseil économique et social européen. Le Comité des Régions, pourtant contrôlé par des élus conservateurs, a aussi voté une résolution bien plus critique, sans doute parce que les élus locaux comprennent qu’un traité sur ces bases restreindra leurs capacités d’action dans les territoires.

« Tout comme sur la gestion de la crise grecque, l’Union européenne s’obstine dans une direction désavouée par les opinions publiques européenne » selon Jean-Michel Coulomb, du Collectif Stop TAFTA, présent actuellement à Strasbourg.

« De la même manière que l’administration Obama a usé d’astuces techniques pour contourner la tendance majoritaire au Congrès américain sur les accords transpacifique et transatlantique il y a quelques semaines, le vote d’aujourd’hui à Strasbourg est le résultat des pressions et d’obscures tractations entre MM Schulz et Lange et les promoteurs du traité. Sans optimisation de la technique parlementaire et sans intrigues de couloir, le texte n’aurait pas été voté » analyse Amélie Canonne, du Collectif de campagne français.

Du reste un nombre croissant d’Européennes et d’Européens s’inquiète du futur traité. Déjà 2,3 millions de citoyens européens ont signé l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) auto-organisée réclamant l’arrêt des négociations transatlantiques. Des mouvements d’opposition émergent en Europe de l’Est, et les campagnes allemande, autrichienne, belge ou britannique continuent de monter en puissance.

Pour Michel Dubromel, également engagé dans la campagne française contre l’accord transatlantique, « Le vote du Parlement européen n’est pas la fin de l’Histoire pour nous, car la résolution n’a pas de caractère contraignant, et nous savons que la DG Commerce est surtout encline à suivre les injonctions des lobbies industriels et financiers. Nous allons donc poursuivre notre travail pour sensibiliser l’opinion mais aussi les élus, et démontrer les méfaits de la politique commerciale conduite par l’UE ».

Le Collectif français Stop TAFTA-Non au grand marché transatlantique continuera donc à s’inscrire dans les mobilisations européennes pour une Europe sociale et démocratique notamment lors des Marches européennes, début octobre, qui partiront d’Europe du Sud, passeront par la France et convergeront à Bruxelles mi-octobre, en même temps que la cloture de l’ICE « Stop TTIP ».