Le Traité sur la charte de l’énergie (TCE) fait à nouveau la démonstration qu’il est une arme à la disposition des industriels des énergies fossiles pour dissuader, retarder ou rendre plus couteuses les politiques de transition énergétique. Ascent Resources, une entreprise pétrolière et gazière britannique poursuit en effet la Slovénie pour l’avoir obligée à réaliser une étude d’impact sur l’environnement avant de procéder à l’exploitation de gaz de schiste par fracturation hydraulique à proximité de ressources en eau. Il est urgent que l’UE et ses États-membres quittent ce Traité qui protège les pollueurs comme l’ont déjà demandé plus d’un million d’Européens (pétition)
Que se passe-t-il quand des populations défendent la planète, leur santé, leurs terres et obtiennent des pouvoirs publics qu’ils agissent contre les pollueurs ? Les entreprises concernées poursuivent les pouvoirs publics devant une justice parallèle pour obtenir de larges indemnisations. Nouveau cas d’école avec les poursuites intentées par l’entreprise britannique Ascent Resources contre la Slovénie pour pouvoir exploiter du gaz de schiste en toute tranquillité. Nous sommes ici au nord-est de la Slovénie dans une petite communauté qui s’appelle Petišovci.
En 2007, Ascent a créé une entreprise commune avec une société publique slovène appelée Geonergo pour extraire du gaz à Petišovci, dans l’est de la Slovénie, et le vendre à la société croate INA. Elle affirme avoir depuis investi 50 millions d’euros (59 millions de dollars américains) dans le projet. En 2017, Ascent a estimé qu’il lui fallait utiliser la fracturation hydraulique pour procéder à cette exploitation et a sollicité une autorisation en ce sens. En mars 2019, l’Agence slovène de l’environnement (ARSO) a décidé que l’entreprise devait réaliser une étude d’impact sur l’environnement car le site est proche de sources d’eau.
Les avocats d’Ascent ont déclaré que cette décision était « manifestement arbitraire et déraisonnable ». Geonergo a contesté la décision d’ARSO mais, en mai 2020, le tribunal slovène a donné tort aà l’entreprise. En juillet 2020, les avocats londoniens d’Ascent ont indiqué à la Slovénie qu’ils engageaient une action en justice en utilisant ces traités qui protègent les investisseurs au détriment de l’environnement.
Dans une lettre adressée au gouvernement slovène, les avocats de l’entreprise ont qualifié les actions du gouvernement d’« arbitraires et déraisonnables ». Comme si évaluer l’impact d’une activité industrielle aux conséquences déjà documentées comme extrêmement dommageables sur l’eau et les terres ne justifiaient pas une étude d’impact.
Ascent Resources, dont le siège est à Londres, intente une action en justice en s’appuyant sur le traité bilatéral d’investissement entre le Royaume-Uni et la Slovénie et sur le controversé traité multilatéral sur la charte de l’énergie (TCE), auquel le Royaume-Uni et la Slovénie ont tous deux adhéré. L’entreprise réclame une compensation de 120 millions d’euros.
Pour le collectif Stop CETA-Mercosur, ainsi que pour ses partenaires européens et français, ce nouveau cas démontre le caractère nocif du Traité sur la charte de l’énergie : alors qu’il est urgent de renforcer les réglementaires environnementales et climatiques, le TCE offre aux pollueurs l’occasion de dissuader, retarder ou rendre plus couteuses les politiques en la matière. Il est urgent que l’UE et ses États-membres, et la France a minima, quittent ce Traité qui protège les pollueurs comme l’ont déjà demandé plus d’un million d’Européens (pétition).
Pour aller plus loin :
VIDEO de 4min explicitant les enjeux
- Présentation en 11 diapos des enjeux autour du TCE ;
- Réponses aux contre-vérités assénées par les promoteurs du Traité sur la charte de l’énergie (ici sur le site de l’Aitec, ici sur le site d’Attac)
- De nouvelles révélations sur le Traité de l’énergie, résumé sur le site de l’Aitec, suite aux enquêtes du collectif de journalistes d’Investigate Europe.
- Un décryptage de la position de la Commission européenne pour les négociations sur la modernisation du TCE, par l’Aitec.
- Rapport de l’Aitec et d’Attac France « Le Traité sur la charte de l’énergie, l’accord qui protège les pollueurs », décembre 2020,
- Le rapport des Amis de la Terre « Attaque en règle contre le climat : 10 raisons pour l’UE et les gouvernements de se retirer du Traité sur la Charte de l’énergie » de mai 2020
- Un rapport, intitulé « une insidieuse expansion », co-publié par CEO, TNI et SEATINI, qui relate la politique d’expansion mené autour du Traité sur la charte de l’énergie, avril 2020
- Présentation détaillée de cas en français : Le cas Vermilion contre la France et le cas Rockhopper contre l’Italie
- 280 organisations appellent les États de l’UE à sortir du Traité sur la charte de l’énergie, décembre 2019,
- Une vidéo en français : Comment une entreprise multinationale veut saboter la décision des Pays-Bas de sortir du charbon.
Liste des organisations en France qui soutiennent la pétition :
350.org, ActionAid France - Peuples Solidaires, Agir-pour-le-Climat, Aitec, Alofa Tuvalu, Alternatiba, Amis de la Terre, ANVCOP 21, Attac France, Bloom, CADTM France, CCFD-Terre Solidaire, Collectif Stop CETA-Mercosur, Comité Pauvreté et Politique, Confédération paysanne, CRID, Emmaus international, Escape-jobs pour l’emploi sans carbone, FNE, Générations futures, Geres, Greenpeace, LDH, Le Mouvement, Notre affaire à tous, Pour un réveil écologique, Réseau action climat, Résilience France, Sherpa, Utopia, Veblen Institute, We move Europe, XR France, Youth for climate,